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  Typologie des instruments à vent

selon leur mode de production des notes

Fiches d'illustration : schalmei ou "Martinophone"

 


Orchestre allemand (Schalmeikapelle Rot Front von Völklingen) de joueurs de schalmei : instruments dans lequel l'air, insufflé à la bouche dans un conduit unique, est réparti par une série de pistons entre un ensemble de pavillons dotés chacun d'une anche battante en laiton (comme les klaxons à poire ou les cornes d'appel à anches).

Inventés en 1900 par l'allemand Max. B. Martin, ces instruments se fabriquent encore de nos jours dans cette même société " Martin ", dont l'activité semble aujourd'hui bien plus orientée sur les klaxons automobiles et de pompiers : voir leur site http://www.maxbmartin.de, à la rubrique " Produkt " puis tout en bas " Martin Trumpeten ". Il faut dire que ces instruments ont du être utilisés aussi bien comme comme instruments de musique que comme instruments à produire des signaux d'appels, sous des formes un peu plus simples.

Cet inventeur a en effet donné son nom à l'instrument soit sous cette dernière forme, soit sous la forme Martinshorn, soit, en français Martinophone. On ignore pourquoi l'instrument a usurpé le nom schamei qui, en allemand, est synonyme de hautbois et principalement utilisé pour les hautbois anciens ou populaires. Le terme Martinshorn est, aujourd'hui, davantage utilisé outre-Rhin pour désigner les klaxons automobiles que l'instrument de fanfare...

La société Martin n'a pas été la seule à fabriquer ce type d'instrument qui, à l'imitation de la famille des saxhorns ou autres cuivres du même type, prend diverses forme selon son registre (voir la carte postale ci-dessus. Il existe également des formes contrebasse à 4 pavillons et s'enroulant autour du musicien à l'instar d'un hélicon.


Schalmei à 8 notes auquel fait défaut le tuyau d'embouchure (sans incidence sur le jeu, cette embouchure peut prendre des formes diverses : sorte de bec ou bien forme externe d'embouchure de tuba). On remarquera que les trois pistons n'ont pas le même débattement : il s'enfoncent tous les trois jusqu'au niveau de leur bouton mais ne remontent pas de la même hauteur.

 Si l'instrument n'a que trois pistons, il délivre tout de même huit notes (une gamme diatonique de sol à sol) par combinaison de ceux-ci, même si, contrairement aux véritables instruments à pistons, il ne s'agit pas ici de rajouter des longeurs de tube mais simplement d'orienter le soufflet vers l'un des huit pavillons, munis chacun d'une anche à son départ. L'ordre des combinaisons s'inspire un peu de celui des instruments à pistons mais il ne faut pas chercher à pousser la comparaison car les instruments à piston offrent une progression chromatique alors qu'ici on en reste à une gamme diatonique. Voici le tableau de doigté en considérant que le premier chiffre (à gauche) correspond au piston près de la bouche (même orientation que sur la photo ci-dessus) et que le chiffre 1 signifie que le piston est enfoncé :

Sol : 0 0 0

La : 0 0 1

Si : 0 1 0

Do : 0 1 1

Ré : 1 0 0

Mi : 1 0 1

Fa : 1 1 0

Sol : 1 1 1

Examinons maintenant par quel astucieux procédé, cet instrument permet toutes les combinaisons de pistons : il est possible de démonter classiquement les pistons, mais pas d'aller inspecter l'intérieur du bloc : il va falloir faire des déduction à partir des canaux visibles sur les pistons

Le premier piston est doté de deux canaux superposés, le premier envoi l'air vers la droite (position au repos) et le second vers la gauche (piston appuyé).

Si ce premier piston peut nous faire penser aux classiques pistons Périnet de nos trompettes, les deux autres pistons sont bien plus simples avec de simples canaux horizontaux : deux disposés à la même hauteur sur le piston du milieu et quatre disposés à la même hauteur deux par deux sur le dernier piston.


Nous avons vu que le premier piston distribue l'air soit vers la droite, soit vers la gauche. Il est probable que les canaux qui repartent tant à droite qu'à gauche, se divisent chacun en deux : une partie monte tandis que l'autre descend. le canal montant se retrouve face au canal du piston lorsque celui-ci au repos, l'air peut alors passer tandis que le canal inférieur est obturé. Lorsque l'on appuie sur le piston, le canal de celui-ci descend, le canal supérieur s'obture tandis que le canal inférieur est libéré.

La même opération se répète avec le troisième piston : chacun des canaux précédent se redivise à nouveau en deux et nous avons donc, tant à droite qu'à gauche, quatre canaux superposés (donc huit en tout) dont deux sont obturés lorsque le piston et au repos et les deux autres lorsque le piston est relâché.

En résumé, le premier piston effectue une séparation en deux canaux sur un plan horizontal tandis que les deux autres opèrent des séparations selon un axe vertical. Le nombre de notes (nombre de pavillons) est donc théoriquement égal à 2 à la puissance du nombre de pistons : 1 piston = 2 notes


, 2 = 4 notes,

3 = 8 notes comme ci-dessus et jusqu'à 4 pistons = 16 notes comme on peut le voir sur cette page : http://pagesperso-orange.fr/trombonetubarun/insolites.html ou sur le site du fabricant Martin cité plus haut : le quatrième piston donne accès aux pavillons produisant les notes altérées.

Mais il y a tout de même des exceptions comme vous pouvez le voir sur la page : http://www.horncollector.com/Other%20Instruments/Schalmei/Schalmei%20Horns.htm : un instrument à trois pistons mais seulement 4 pavillons : le troisième piston permet de produire non plus des notes séparées mais un accord comme l'indique le texte de la page 129 du catalogue ancien d'instruments de musique que j'ai mis en ligne ici : http://jeanluc.matte.free.fr/catal/catal.htm et d'où sont tirés les trois instruments dessinés sur la présente page...

Il existe également des instruments à un seul piston et quatre pavillons : deux accords de deux notes sont possibles selon la position du piston (photo à venir). Dans ce cas il s'agit très probablement plus d'un instrument d'appel (destiné à produire des signaux sonores audibles de loin) que d'un instrument de musique.

Et, plus étonnant, un schalmei chromatique à 16 pavillons, pour seulement trois pistons visibles, sur la page http://www.isentaler-schalmeien.de/die_schalmei.htm consacrée à cet instrument et son histoire au sein du site d'un ensemble allemand : je n'ai pas encore trouvé l'explication...

Dans l'annuaire Musique-Adresse de 1921 on relève à la page 329 cette publicité de la maison français J-B Martin qui cite le martinophone :

Y a-t-il un lien entre la maison allemande Martin et la maison française J-B Martin ou bien n'est-ce qu'une reprise du nom ?

Vous pouvez encore voir un martinophone à huit pavillons sur la page http://pagesperso-orange.fr/musibrass/pages/martinophonepag.html d'un collectionneur d'instrument


Les ensembles de Schalmei aujourd'hui...


Ensemble de Schalmei, Schleife, Allemagne, Lusace, 1997 (cliché David Bourger) Il doit s'agir de la Schalmeienkapelle Cottbus

Ces ensembles sont encore nombreux en Allemagne comme on peut le voir cette page de liens du site de l'un d'entre eux : http://www.schalmeienzunft.de/links.htm ou en tapant " schalmeien " sur un moteur de recherche.

 

Le caractère pour les moins original de ces instruments leur a naturellement donné une place dans l'instrumentarium des clowns, auprès du concertina et de la scie musicale (au grand désespoir de ceux qui souhaitent que ces instruments soient considérés comme des instrument à part entière...)

4 martinophones de tonalités différentes et un trombone à coulisse joués par "Les Zacchini et Cie" au cirque Busch-Roland le 16-07-1975.
Cliché Radio-Télévision-Belge, document fourni par Thierry Legros (cliquez sur l'image pour l'ouvrir en grand dans un nouvel onglet)

 

En France, les Compagnons de la Chanson ont utilisé ces instruments mais, actuellement deux ensembles à ma connaissance jouent de ces instruments : en région parisienne la fanfare Zek de l'association L'Armée du Chahut http://larmeeduchahut.free.fr


(cliché X tirée de leur site, avec un arrosoir bigotphone sur la droite)

et en Alsace le Rhinau Schalmeien http://www.rhinau-schalmeien.com


(cliché X tirée de leur site)



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