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  Typologie des instruments à vent

selon leur mode de production des notes

Fiches d'illustration : démontage d'un harmoniflûte (1/2)

(photos en grandes définition en cliquant sur celles de la page)

Voici un instrument qui s'apparente aux harmoniflûtes et qui doit dater du milieu XIXème. Il s'agit donc de l'une des premières formes d'accordéon, mais également d'harmonimum comme nous le verrons ci-dessous.

L'instrument ne porte aucune signature, sinon ces initiales LT sur le côté du clavier. (un flûtina portant ces mêmes initiales, était attribué à Kaniguissert, sur le site http://www.instrumantiq.com)

Lorsqu'on le pose sur une table, l'instrument se présente comme une caisse en bois moulurée, munie d'un clavier chromatique sur l'avant et de deux soufflets sur l'arrière, occupant chacun la moitié de la largeur de l'instrument :

Vue de dessous. Bien que l'instrument soit prévu pour être posé sur une table, le constructeur n'a pas prévu de pieds d'où les traces d'usure (alors que, curieusement, l'arrière des soufflets comporte des petits clous à têtes rondes qui auraient pu remplir cet office ici) :

En regardant à l'arrière, nous constatons que le soufflet situé à gauche pour le musicien face au clavier (donc à droite sur la photo), comporte des entrées d'air (fermées à l'intérieur par un clapet en cuir beige), tandis que le second soufflet n'en comporte pas :

Jetons un coup d'oeil à l'intérieur pour tenter de comprendre. Pour cela il suffit de dévisser quatre vis en façade et celle-ci peut-être retirée avec le clavier et tout le mécanisme à l'arrière de celui-ci. Il ne reste plus qu'une caisse pratiquement vide :

Remarquons tout de même l'étancheïté assurée sur tout le tour par des bandes de cuir, mais également les deux rectangles de cuir blanc au fond à gauche.

Collés sur leur grand côté du haut seulement, ils recouvrent chacun quatre ouvertures rondes qui offrent une communication avec le soufflet de droite, celui qui dispose d'une entrée d'air, elle même munie des clapets beiges que nous avons aperçus précedemment (ceux-ci étaient peut-être blanc au départ mais cela va me permettre de les différencier par la suite...). Nous avons donc à gauche un fonctionnement classique de soufflet avec deux ensembles de clapets : l'un, beige, à l'admission s'ouvre lorsque l'on déplie le soufflet et permet à l'air d'entrer dans celui-ci. Il se referme lorsque l'on replie le soufflet afin que l'air ne puisse partir vers l'extérieur. Le second (les cuirs blancs de la photo ci-dessus), à la sortie du soufflet s'ouvrent lorsque l'on ferme le soufflet et permettent à l'air d'entrer dans la caisse et se ferment lorsque l'on ouvre le soufflet, de façon à éviter que l'air introduit dans l'instrument ne ressorte.

Penchons nous maintenant sur le soufflet de droite, dont nous voyons qu'il communique avec la caisse par une grand ouverture sans clapet :

Cette ouverture est cependant occupée par une tige de laiton faisant office de ressort. Celle-ci est reliée à la planchette arrière du soufflet par une sangle.

Nous en déduisons que ce soufflet est, en fait, un régulateur de pression permettant, à l'instar d'une poche de cornemuse, de continuer à jouer, même lorsque le soufflet d'alimentation ( celui de gauche) s'ouvre pour reprendre de l'air et ne fournit donc plus de pression à l'instrument. Le fonctionnement est le suivant :

- lorsque le soufflet de gauche est refermé sous l'action de la main du musicien, les clapets de cuir blanc s'ouvrent et l'air entre dans la caisse, augmentant la pression dans celle-ci. Cette augmentation de pression conduit l'air à passer par l'ouverture oblongue dans le soufflet régulateur (celui de doite) et ce dernier s'ouvre en tendant le ressort.
- lorsqu'après avoir vidé le soufflet d'alimentation, le musicien doit réouvrir celui-ci pour reprendre de l'air, les clapets blancs se ferment et la pression demeure constante dans la caisse si aucune note n'est jouée (aucune perte d'air). Par contre, si le musicien joue, la pression va avoir tendance à baisser à l'intérieur de la caisse. La pression dans le soufflet régulateur va devenir inférieure à la tension du ressort et ce soufflet va se refermer, réalimentant la caisse avec l'air emmagasinné dans la phase précédente.
- la pression est donc sensiblement constante à l'intérieur de l'instrument tant que le musicien assure une alimentation suffisante et redonne de l'air avec le soufflet d'alimentation avant que le soufflet regulateur ne soit vide et que, à l'inverse, il n'envoie pas avec le soufflet d'alimentation une pression trop supérieure à celle du ressort du soufflet régulateur.

Cet instrument fonctionne donc à pression sensiblement constante et n'est donc pas "expressif", c'est à dire que, contrairement à un accordéon, le musicien ne peut jouer sur la pression du soufflet et donc sur l'intensité des notes pour donner des nuances.

Ce système offre, par contre, deux avantages :

- il permet d'assurer une alimentation continue avec une main seulement
- il permet à l'instrument de jouer uniquement avec un sens unique de circulation d'air, contrairement aux accordéons , qu'ils soient diatoniques ou chromatiques, où le musicien joue tant en fermant qu'en ouvrant le soufflet ce qui requière deux anches par bouton car les anches libres ne fonctionnant que dans un sens. Ici nous verrons que nous avons deux anches par bouton mais pour une autre raison.

Le système de soufflet régulateur est utilisé sur certains harmoniums (voir celui démonté sur ce site) possédant pourtant deux soufflets d'alimentation (un pour chaque pied du musicien). Dans ce dernier cas, ils sert à assurer une transition sans accoup entre les deux soufflets et son grand volume permet aussi de compenser la différence de débit d'air au sein d'un morceau selon que l'on joue silence, mélodie seule ou mélodie + accords plus ou moins appuyés etc....


Pour observer le fond de la caisse de l'instrument, nous avons retiré la façade sur laquelle est fixée le clavier à l'avant et tout le bloc des sommiers et anches à l'arrière. Voyons tout cela. De face :

de dessous (nous voyons les anches, une autre rangée d'anches est disposée de la même manière sur le dessus) :

Par l'arrière :

la face arrière est constituée d'une planchette faisant office de couvercle et donc l'étanchéïté est assurée par de larges bandes du cuir

Voir la suite de ce démontage --->


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